03/02/2023

Petit pense-bête du bon usage du titre d’avocat ou de la qualification de spécialiste (notamment dans les médias)

Les récentes pérégrinations d’un conseiller d’Etat, qui fut avocat il y a fort longtemps, en recherche d’une audience politique et les quelques curiosités de titrages que l’on a pu être amené à constater à son sujet sur de nombreuses chaines de télévision, comme de récents qualificatifs utilisés par certains signataires de tribunes dans la presse écrite, nous conduisent à penser que la question de l’usage du titre d’avocat est loin d’être pleinement maitrisée alors même que les choses sont, en la matière, d’une simplicité biblique.
 
 
1. Du bon usage du titre d’ « avocat » ou de celui d’ « avocat honoraire ».
 
SEULS les avocats régulièrement inscrits auprès d’un barreau et autorisés à exercer peuvent utiliser le titre d’« avocat ».
 
Cela exclut :
 
- Les avocats suspendus temporairement ou interdits temporairement, pour lesquels les textes prévoient expressément que, bien que toujours inscrits auprès d’un barreau, ils ne peuvent en aucune circonstance faire état de leur qualité d'avocat (Décr. n°91-1197, 27 nov. 1991, art. 186) ;
 
- Les anciens avocats qui ne sont plus inscrits auprès d’un barreau, que ce soit à la suite d’une démission, d’une omission ou d’une radiation ;
 
- Les futurs avocats qui ne sont pas encore inscrits ou réinscrits auprès d’un barreau.
 
 
SEULS les anciens avocats ayant régulièrement été admis à l’honorariat auprès d’un barreau peuvent utiliser le titre d’« avocat honoraire », et en aucun cas d’autres termes incluant « avocat ».
 
Dès lors :
 
- L’usage du terme « ancien avocat » constitue, dans tous les cas, une usurpation de titre d’avocat (Paris, 11ème ch., sect. A. 27 janv. 1998, RG n°97/03082).
 
 
Les avocats étrangers doivent utiliser leur titre d’origine, sous sa dénomination d’origine.
 
Ainsi, les avocats européens exerçant en France sous leur titre d’origine ne sauraient en aucun cas, dans toute communication sur le territoire national, utiliser le terme d’avocat : ils doivent impérativement utiliser leur titre d’origine, dont la liste figure à l’article 201 du décret du 27 novembre 1991, et ce, dans sa langue de l’état d’origine (Décr. n°91-1197, 27 nov. 1991, art. 202) (a contrario : Lyon 12 déc. 2019, RG n°19/02241 ; Paris, pôle 4, ch. 13, 11 févr. 2021, RG n°19/08545).
 
Il en est de même, par analogie, d’un avocat appartenant à tout autre barreau étranger, ce point étant expressément précisé pour ceux autorisés à exercer, en France, l'activité de consultation juridique et de rédaction d'actes sous seing privé pour autrui (L. n°71-1130, 31 déc. 1971, art. 105).
 
 
2. Du bon usage des qualités de « spécialiste » ou « avocat spécialisé ».
 
SEULS les avocats titulaires d’un certificat de spécialisation régulièrement obtenu et non invalidé peuvent faire état de ladite mention de spécialisation, ainsi que, le cas échéant, de la qualification spécifique qui y est attachée.
 
La spécialisation constituant une qualification professionnelle, un avocat ne saurait dès lors être qualifié de « spécialiste en … » ou « avocat spécialisé en … » et ce, y compris travers d’une terminologie susceptible de créer dans l’esprit du public, l’apparence d’une spécialisation telle que : « expert en … tout » ou toute autre expression pouvant prêter à confusion et ce, même en ayant recours à des mentions qui ne sont pas des mentions de spécialisation.
 
 
3. In fine, on rappellera que :

- L’avocat est toujours personnellement responsable, notamment sur le plan disciplinaire, de l’usage de son nom,  titres et qualifications fait par des tiers et il lui appartient d’avertir ces mêmes tiers des éventuelles restrictions liées à l’application de ses règles professionnelles et principes essentiels (v. D. Piau, S. Bortoluzzi et T. Wickers, Règles de la profession d’avocats, 17e éd., 2022, Dalloz Action, n°312.113 et s.) ;
 
- L’usurpation de titre (v. D. Piau, S. Bortoluzzi et T. Wickers, Règles de la profession d’avocats, 17e éd., 2022, Dalloz Action, n°612.60 et s.) est définie à l’article 74 de la loi du 31 décembre 1971, qui prévoit que : « Quiconque aura fait usage, sans remplir les conditions exigées pour le porter, d'un titre tendant à créer, dans l'esprit du public, une confusion avec le titre [d’avocat] sera puni des peines encourues pour le délit d'usurpation de titre prévu par l'article 433-17 du code pénal », soit un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende (v. par ex. Crim. 6 déc. 2016, n°16-80.825, NP).
 
 
4. Et en cas de doute ?
 
Il suffit de consulter l’annuaire des avocats de France tenu par le Conseil national des barreaux :